Le diagnostic de certitude d’une infection respiratoire équine nécessite la réalisation d’examens complémentaires. Mais que savons-nous exactement des différents tests à notre disposition?
Par la rédaction de bioMérieux | Temps de lecture : 5 min
When faced with a potentially contagious respiratory disease, the history and physical examination are obviously the first steps in evaluating the situation. However, laboratory testing remains essential to detect and identify the pathogens responsible for the infection, and thus confirm the risk of spreading to other horses.
In such urgent situations, the key question is: are all tests really equivalent ?
Sachant qu’en matière de biosécurité chaque minute compte, on peut naturellement se demander si les tests rapides mis en œuvre sur le terrain sont aussi fiables que les techniques classiques réalisées en laboratoire.
Dans cet article, nous passons en revue les outils diagnostiques disponibles pour les maladies respiratoires équines. Nous mettrons en lumière leur capacité à fournir un diagnostic précoce et précis, afin d’améliorer la prise en charge clinique tout en limitant le risque d’épidémie au sein d’une écurie.
Quels sont les signes cliniques typiques des maladies respiratoires équines ?
- Tachypnée : augmentation anormale de la fréquence respiratoire.
- Respiration bruyante : peut survenir à l’inspiration, et/ou à l’expiration, souvent associée à des pathologies des voies respiratoires supérieures.
- Bruits pulmonaires anormaux : tels que des crépitements, frottements pleuraux ou sifflements.
- Dyspnée (respiration laborieuse) : caractérisée par des mouvements respiratoires anormaux, une dilatation des naseaux, une abduction des coudes, une extension de la tête et une réticence à se coucher.
- Fièvre : Augmentation de la température potentiellement due à une infection virale ou bactérienne.
Réaliser un prélèvement dans les voies respiratoires d’un cheval est un acte invasif qui nécessite une expertise vétérinaire et un matériel adapté.
Les principaux types de prélèvements sont :
- Ecouvillons naso-pharyngés qui sont utilisés pour collecter des échantillons au niveau des cavités nasales profondes ;
- Ecouvillons des poches gutturales qui sont réalisés en particulier pour la recherche de Streptococcus equi subsp. equi ;
- Lavage trachéal qui consiste à introduire un cathéter par la narine jusque dans la trachée afin de recueillir du liquide et des cellules des voies respiratoires ;
- Lavage broncho-alvéolaire (BAL) pour lequel le vétérinaire va introduire un cathéter jusque dans les poumons pour prélever un échantillon de liquide et de cellules. Cette technique est particulièrement utile pour caractériser les infections des voies respiratoires inférieures.
Une fois les échantillons prélevés, ils doivent être conservés dans des conditions optimales afin de pouvoir être analysés selon les différentes techniques.
Dans de nombreuses situations, comme un stockage à température non contrôlée ou un retard dans l’acheminement vers le lieu d’analyse, la qualité du résultat final peut-être compromise, entraînant alors des conclusions erronées.
Diagnostic moléculaire
Les outils de diagnostic moléculaire modernes permettent de détecter directement le matériel génétique des agents pathogènes, offrant ainsi une identification rapide et précise de l’agent infectieux.
Avant toute analyse, l’échantillon doit être soigneusement préparé : le processus d’extraction consiste à lyser les cellules afin de libérer l’ADN ou l’ARN, puis à les purifier pour éliminer les protéines, enzymes et autres inhibiteurs. L’extraction constitue une étape clé pour garantir la performance du test.
Principales techniques d’isolement et de purification de l’ADN
Avant l’amplification de l’ADN, il est essentiel de réaliser des étapes d’isolement et de purification efficaces afin d’obtenir un matériel génétique de haute qualité. Pour cela, les cellules doivent d’abord être lysées afin de libérer leur contenu. Cette lyse peut être chimique (à l’aide de détergents et d’enzymes), thermique (par l’application de chaleur afin de déstabiliser les structures cellulaires) ou mécanique (en brisant physiquement les cellules à l’aide d’outils tels qu’un broyeur à billes ou par sonication).
Combiner différentes méthodes permet d’éliminer efficacement les composants cellulaires indésirables tout en préservant un maximum d’ADN.
Les études récentes montrent que l’association de la lyse chimique et mécanique donne d’excellents résultats, permettant à la fois un rendement élevé en ADN et une bonne conservation de sa qualité, à condition de contrôler finement l’action mécanique.
À l’inverse, la lyse thermique est souvent jugée moins performante car elle libère moins d’ADN exploitable que les approches chimique ou mécanique, ce qui explique son usage limité en pratique.
Une fois les cellules lysées, l’ADN doit être purifié. La méthode la plus répandue utilise des colonnes à base de silice qui fixent et nettoient l’ADN. Une alternative tout aussi efficace utilise des billes magnétiques, qui permettent d’isoler et de purifier le matériel génétique tout en le maintenant intact et prêt pour l’amplification.
PCR
L’amplification en chaîne par polymérase, plus connue sous le nom de PCR (Polymerase Chain Reaction), a été inventée en 1983. C’est une technique à la fois sensible et spécifique, utilisée pour détecter la présence d’ADN viral ou bactérien dans un échantillon. La PCR est particulièrement pertinente pour détecter des pathogènes difficiles à cultiver, et permet également de mettre en évidence des gènes de résistance aux antibiotiques.
Chez le cheval, la PCR est aujourd’hui la méthode la plus rapide et la plus efficace pour identifier l’agent responsable d’une maladie respiratoire.
Le principe repose sur un processus d’amplification réalisé en cycles successifs, chacun comprenant trois étapes contrôlées par la température :
- Dénaturation (~95 °C) : séparation des deux brins d’ADN;
- Hybridation (~56 °C) : fixation des amorces spécifiques sur les brins cibles;
- Elongation (~72 °C) : synthèse du nouvel ADN par l’enzyme polymérase.
Les températures exactes varient selon la séquence génétique ciblée et sont ajustées lors de la mise au point du test pour garantir une spécificité et une sensibilité maximales.
Le mélange réactionnel de PCR est préparé en associant l’acide nucléique purifié à l’ADN polymérase, aux amorces spécifiques, aux dNTPs, au tampon réactionnel, au chlorure de magnésium et à l’eau.
Ce mélange est ensuite placé dans un thermocycleur, qui alterne des phases de haute et basse température selon un programme défini afin de permettre l’amplification du matériel génétique.
LAMP
La technique d’amplification isotherme en boucle, plus connue sous l’acronyme LAMP (Loop-Mediated Isothermal Amplification), est une méthode d’amplification de l’ADN réalisée à température constante, généralement entre 60 et 65 °C.
Contrairement à la PCR, qui n’utilise que deux amorces pour cibler une séquence, la LAMP mobilise un jeu de quatre à six amorces.
La préparation des échantillons pour la LAMP est sommaire : l’échantillon est collecté puis chauffé ou traité avec un tampon de lyse pour libérer les acides nucléiques. Le mélange réactionnel contient alors la polymérase, les amorces, les dNTPs, un tampon et les autres réactifs nécessaires.
L’amplification aboutit à la formation de structures en tiges et en boucles. Les régions en boucle, constituées de séquences répétées issues de l’ADN ou de l’ARN cible, servent de matrice pour de nouvelles synthèses d’ADN, entraînant une amplification rapide et exponentielle.
Les résultats peuvent être détectés visuellement sans équipement complexe. Différentes méthodes existent, comme l’ajout de colorants intercalants produisant un changement de couleur ou un signal fluorescent lorsqu’ils se lient à l’ADN amplifié, ou encore la détection par turbidité, liée à l’accumulation de pyrophosphate de magnésium qui trouble la solution au cours de la réaction.
Différences clés entre la PCR et la LAMP :
- Amplification non spécifique et faux positifs : La LAMP utilise 4 à 6 amorces, ce qui accroît les risques de formation de dimères d’amorces et de liaisons non spécifiques. Des faux positifs apparaissent fréquemment après 25 à 30 minutes dans les témoins sans matrice (Thi et al., 2020).
- Multiplexage et quantification: Contrairement à la qPCR, qui permet aisément de détecter plusieurs cibles à la fois et fournit des valeurs de Ct fiables pour une quantification précise, la LAMP est beaucoup plus limitée. Dans la plupart des cas, elle ne permet de détecter qu’un seul agent par réaction, les interactions entre amorces limitant le multiplexage; et les résultats se présentent généralement sous forme qualitative, positif ou négatif (Acevedo et al., 2018b).
- Contamination croisée : Les rendements élevés en ADN obtenus avec la LAMP augmentent le risque de contamination lorsque l’on ouvre les tubes, surtout lors d’une mise en œuvre en dehors d’un laboratoire contrôlé (Hardinge & Murray, 2019).
Culture bactérienne
La culture bactérienne est une méthode traditionnelle qui consiste à faire pousser l’agent pathogène en laboratoire à partir d’un échantillon prélevé. Elle est particulièrement utile pour confirmer des infections comme la gourme, causée par Streptococcus equi subsp. equi, ou encore certaines pneumonies bactériennes. Elle permet non seulement d’identifier avec précision la bactérie responsable, mais aussi de connaître sa sensibilité aux antibiotiques, ce qui aide le vétérinaire à choisir le traitement le plus adapté.
Cependant, la culture présente des limites importantes. Les résultats demandent souvent entre deux jours et une semaine, un délai souvent trop long dans les cas graves où une prise en charge rapide est indispensable. De plus, elle ne concerne que les infections bactériennes et ne permet pas de détecter les virus, pourtant responsables d’une grande partie des maladies respiratoires équines. Enfin, même parmi les bactéries, certaines espèces se révèlent difficiles, voire impossibles à cultiver, ce qui peut conduire à des résultats non concluants.
Pour toutes ces raisons, la culture bactérienne reste un outil précieux, mais avant tout complémentaire, dans le diagnostic d’infections respiratoires bien spécifiques.
Sérologie
La sérologie consiste à analyser le sang d’un cheval pour rechercher des anticorps dirigés contre des agents infectieux spécifiques. La présence de ces anticorps indique que l’animal a été en contact avec le pathogène, soit à la suite d’une infection, soit après une vaccination. Elle est donc particulièrement utile pour détecter une exposition à des maladies comme la grippe équine ou l’herpèsvirus équin.
Néanmoins, la sérologie ne permet pas, à elle seule, de confirmer une infection active. Les anticorps sont produits au cours des jours suivants une infection et peuvent persister longtemps après l’exposition à l’agent pathogène, ou même apparaître à la suite d’une vaccination, ce qui entraîne un risque de faux positifs. Pour cette raison, la sérologie ne doit être utilisée qu’en complément d’autres outils diagnostiques.
Lorsqu’une infection respiratoire se déclare, la santé et la sécurité des chevaux reposent largement sur notre capacité à détecter et identifier rapidement les agents pathogènes responsables. Pour cela, il est essentiel d’utiliser des outils diagnostiques précoces et fiables.
Si la médecine équine bénéficie aujourd’hui de nombreuses innovations, il reste important de comprendre les spécificités de chaque méthode, car elles peuvent influencer directement les résultats.
Dans le cas des tests moléculaires, il faut considérer toutes les étapes, de la lyse cellulaire à l’amplification, pour garantir les meilleures sensibilité et spécificité.
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